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Des règles de zonage excluent les moins nantis en quête d’une vie meilleure

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2 octobre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Les règlements de zonage trop restrictifs dans les municipalités québécoises empêchent indirectement les moins nantis d’améliorer leur sort en déménageant dans un endroit plus prospère, selon l’Institut économique de Montréal (IEDM).

C’est l’une des conclusions d’un nouveau classement de la mobilité sociale publié jeudi par l’organisme de réflexion associé à la droite économique.

La mobilité sociale est la capacité d’améliorer sa position relative sur l’échelle de revenus par rapport à ses parents. Il ne s’agit pas seulement d’avoir un meilleur niveau de vie, a précisé l’économiste senior à l'IEDM, Vincent Geloso, en entrevue.

«Si tout le monde s'enrichit de 50 % et que, moi, je m'enrichis de 50 %, je suis quand même au même point que mes parents étaient relativement à tout le monde à leur époque», a-t-il illustré.

Or, de nombreux obstacles se dressent sur le chemin des Québécois qui aspirent à un meilleur contexte socio-économique, selon l’IEDM.

Les règles de zonage qui limitent la construction de nouvelles habitations sont l’un des principaux obstacles à la mobilité sociale, selon M. Geloso. Des réglementations réduisent l’offre, ce qui rend le logement plus dispendieux. «Donc, moins accessible.»

Le prix des logements devient ainsi plus élevé dans les secteurs où l’économie est plus prospère, ce qui limite la capacité des moins nantis d’y emménager et de profiter de ce dynamisme, a expliqué l’économiste.

Il donne l’exemple de la métropole. «Montréal est un endroit à haute productivité, a-t-il souligné. Il y a énormément d'innovations qui se font à Montréal et les salaires sont plus élevés qu’ailleurs.»

Or, il peut être difficile pour un résident des régions d’y déménager pour gagner plus de revenus, car le logement y est inaccessible, a-t-il ajouté. «Quand vous regardez la littérature sur la mobilité sociale, une des corrélations les plus importantes, c'est la mobilité géographique des gens.»

L’IEDM identifie aussi les critères pour obtenir une certification professionnelle comme un frein à la mobilité sociale. Ils «restreignent l’accès à certaines professions en imposant des formations coûteuses, de longs programmes d’apprentissage, un nombre minimum d’heures avant l’exercice et des frais d’inscription», peut-on lire dans le document.

Un taux marginal d’imposition plus élevé freinerait aussi la mobilité sociale, toujours selon l’IEDM, notamment en décourageant le travail, «mais dans la chaîne des choses, ce n'est pas le plus important», a précisé l’économiste.

Les revenus de l’État peuvent financer des programmes sociaux qui favorisent la mobilité sociale, en éducation par exemple. «Les deux peuvent s'annuler et avoir un effet quasi nul», a-t-il résumé.

Le Québec, cancre de la mobilité?

Le Québec arrive dernier dans le classement de l’IEDM parmi les provinces canadiennes, selon les conditions que l'IEDM juge favorables à la mobilité sociale à long terme.

Pour la mobilité de la génération des millénariaux, le Québec s'est plutôt situé dans la moyenne canadienne en matière de mobilité sociale.

Au Québec, un adulte né entre 1982 et 1985 de parents parmi les 20 % les plus pauvres avait 33 % de probabilité de se retrouver dans le même groupe à l’âge adulte, selon une étude publiée dans la «Revue canadienne d’économique» en 2023.

C’est un peu moins mobile qu’en Ontario (31,7 %), mais mieux qu’au Manitoba (42,2 %) et qu’en Saskatchewan (41,5 %).

Comme partout au Canada, la mobilité est toutefois moins grande pour les enfants des années 1980 qu'elle ne l'a été pour les enfants nés dans les années 1960.

Selon l’IEDM, le Québec arrive dernier dans presque tous les indicateurs qui favorisent la mobilité sociale, à part l’éducation et l’impôt des entreprises.

«Le Québec est dans la moyenne, peut-être même un petit peu mieux que la moyenne, pour l’impôt des sociétés, a répondu M. Geloso. Plusieurs personnes sont surprises quand je le mentionne.»

Les jeunes Québécois se classent aussi régulièrement parmi les meilleurs au monde dans les classements en mathématique. Cette réussite est attribuable au système d’éducation, selon l’économiste.

Certaines caractéristiques du tissu social, comme le degré de confiance entre les citoyens, nuisent aussi à la mobilité sociale, selon l’IEDM. «Le Québec dans ce domaine-là ne performe pas aussi bien qu'on pourrait croire», a déploré l’économiste.

«Quand on regarde les indicateurs du tissu social, notamment la philanthropie, le bénévolat, le Québec est nettement au bas de l'échelle au Canada, a-t-il ajouté. (…) C’est un peu déprimant, franchement.»

Stéphane Rolland, La Presse Canadienne