Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

La Cour d'appel confirme l'exigence d'une lettre pour la désignation du sexe

durée 20h55
21 mars 2024
La Presse Canadienne, 2024
durée

Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Des défenseurs des droits des transgenres se disent déçus par une décision de la Cour d'appel du Québec qui confirme une loi obligeant les personnes mineures qui souhaitent changer leur désignation officielle de sexe à obtenir au préalable une lettre d'un professionnel de la santé ou d'un travailleur social.

La décision de jeudi annule une décision d’un tribunal inférieur de 2021 qui avait déclaré la règle invalide, en jugeant qu'elle violait la dignité et les droits à l’égalité des personnes adolescentes transgenres et non binaires.

La loi québécoise stipule que les personnes mineures qui demandent un changement officiel de désignation de sexe auprès de la province doivent fournir une lettre d'un médecin, d'un psychiatre, d'un sexologue ou d'un travailleur social déclarant que le changement est «approprié».

Les juges Geneviève Marcotte et Marie-Josée Hogue de la Cour d'appel ont déclaré que cette exigence constitue une mesure appropriée pour évaluer le «sérieux» de l'intention d'une personne mineure de changer sa désignation de sexe. Les limites qui en résultent aux droits des personnes mineures, tels qu'ils sont inscrits dans la Charte québécoise des droits et libertés et dans la Charte canadienne des droits et libertés, sont donc justifiées, ont-elles déclaré.

Cependant, les juges ont déclaré que la règle ne devrait pas permettre aux professionnels de la santé de décider quelle devrait être l'identité de genre d'une personne mineure, mais leur permettre d'évaluer la compréhension d'une personne mineure du processus de changement de désignation de sexe et si elle l'entreprend volontairement.

«Ainsi, le fardeau imposé aux personnes mineures est raisonnable dans les circonstances», écrivent les juges Marcotte et Hogue dans l'opinion majoritaire, car «il tient compte de leur réalité, du fait qu’elles n’ont pas toutes atteint leur pleine maturité et que certaines peuvent être plus vulnérables en raison de leur âge».

Le troisième juge du comité, Stephen Hamilton, a prononcé une opinion concourante, en accord avec les conclusions de ses collègues, mais à travers une analyse juridique légèrement différente.

Des obstacles déraisonnables

Réagissant à la décision de jeudi, la juriste montréalaise Celeste Trianon a déclaré que la disposition relative à la lettre pose des obstacles déraisonnables aux jeunes transgenres qui demandent un changement de désignation de sexe.

L'évaluation professionnelle requise peut être d'un coût prohibitif, en particulier pour les personnes mineures transgenres ou non binaires qui n'ont pas le soutien de leurs parents ou qui sont sans abri, a déclaré Celeste Trianon dans une entrevue. Il peut également être difficile pour les personnes transgenres et non binaires de trouver des professionnels sympathiques à leur demande, a-t-elle expliqué.

«Si vous vous adressez à des professionnels, vous serez confronté à bon nombre des obstacles qui existent au sein du système d'obtention de soins de santé pour les personnes trans au Québec, a soutenu Celeste Trianon. Cela va créer des retards et, dans de nombreux cas, créer un obstacle financier.»

Audrey Boctor, avocate du Centre de lutte contre l’oppression des genres, établi à Montréal — qui a plaidé devant les tribunaux contre l'exigence d'une lettre — a déclaré jeudi que l'organisation était déçue par la décision, mais ne pouvait pas encore dire si elle ferait appel devant la Cour suprême du Canada.

La Cour d'appel a donné gain de cause sur un point au Centre de lutte contre l’oppression des genres, statuant que les personnes mineures d'au moins 14 ans n'ont pas besoin d'informer leurs parents pour demander un changement de prénom afin qu'il corresponde à leur identité de genre.

Thomas MacDonald, La Presse Canadienne