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Une majorité d'adolescents s'informent sur la sexualité à l'école

durée 15h35
1 mars 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — L'école est le principal endroit où une majorité d'adolescents s'informent sur la sexualité, selon un récent rapport de Statistique Canada qui a analysé les données de l'Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes de 2019. 

Dans le cadre de l'enquête, plus de la moitié des jeunes âgés de 15 à 17 ans (56 %) ont déclaré qu'ils obtenaient leurs informations sur la sexualité à l'école. Cela rassure la sexologue Julie Lemay puisque le milieu scolaire est une source fiable et peut donner de l'apprentissage sur plusieurs facettes de la sexualité, comme aux niveaux biologique, affectif et éthique. 

Plusieurs adolescents (36 %) ont aussi dit que leurs amis étaient une source d'information en matière de santé sexuelle. Se confier aux amis, partager l’aspect émotif et être complice sont positifs dans l'apprentissage, indique Julie Lemay, qui est également autrice du livre «Éducation à la sexualité: de la naissance à la préadolescence». 

«Ça peut tellement faire de bien d’avoir ce réseau de soutien, ce n’est pas du tout une mauvaise chose», dit-elle. 

Parmi les autres sources courantes consultées par les adolescents figurait l'internet (46 %). À noter que l'enquête indique que la plupart des jeunes ont diverses sources de renseignement.

Or, l'internet regorge de plusieurs sources qui ne sont pas fiables. «C’est beaucoup un terrain glissant en matière d’information à la sexualité, particulièrement chez les jeunes parce que sur internet on peut avoir autant des formules de témoignages qui vont côtoyer de l’éditorial et de l’expertise», souligne Mme Lemay. Elle estime qu'il y a encore beaucoup d'éducation à faire auprès des jeunes sur la manière de reconnaître une source fiable. 

Sur internet on retrouve aussi des sites pornographiques que les jeunes peuvent consulter, particulièrement au niveau du savoir-faire par rapport à la sexualité. «Ça peut être une source où les jeunes vont se tourner par curiosité parce que c’est super accessible. Ça peut être fait incognito, de façon confidentielle, mais ça peut venir beaucoup contaminer leur perception, créer de l’anxiété aussi», explique la sexologue. 

Les jeunes n'ont pas les repères pour juger que ce n'est pas le reflet de la réalité. Comme adulte, on a une responsabilité de guider les jeunes dans leurs questionnements, ajoute-t-elle. 

Le rapport montre toutefois que ce ne sont pas tous les jeunes qui ont accès à un adulte pour les guider. Ce sont 85 % des jeunes qui ont déclaré avoir un adulte à qui parler pour obtenir de l’aide ou des conseils sur la puberté, le développement de leur sexualité et la santé sexuelle. Cela laisse 15 %, soit 165 000 adolescents canadiens, sans adulte pour s'informer sur ces enjeux. 

Bien que Mme Lemay soit ravie qu'une majorité des jeunes aient accès à un adulte pour discuter de sexualité, elle se demande comment il se fait que ces jeunes soient sans soutien. Elle se désole que le jeune ne repère pas dans son entourage un adulte comme étant suffisamment à l'écoute. «Il faut se questionner pour savoir qu’est-ce qu’on peut faire à ce niveau pour que la statistique continue de s’améliorer», mentionne la sexologue. 

Rôle du parent 

Mme Lemay explique que les parents sont des éducateurs à la sexualité de leur jeune de façon naturelle. Par exemple, la façon dont ils parlent à leur partenaire, les commentaires qu'ils peuvent faire sur leur propre apparence physique ou celle des autres sont des moments d'éducation à la sexualité. 

Selon la sexologue, les adultes doivent aussi s'éduquer avec des sources fiables sur la santé sexuelle. «Parce que ce n’est pas tous les adultes qui ont bénéficié d’une éducation à la sexualité qui prônait l’aspect positif, l’aspect du plaisir», précise-t-elle. Certains peuvent entretenir un malaise en raison de l'éducation qu'ils ont reçue. 

Le premier conseil que Mme Lemay donne habituellement aux parents est de tout simplement s'intéresser à son ado. Il ne faut pas seulement parler de contraception ou d'infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS). 

«On ne peut pas s’attendre à ce que le jeune se confie à nous si on n'entretient pas ce lien de s’intéresser à ses journées», indique Mme Lemay. Les parents peuvent par exemple demander si la relation avec un proche a changé s'ils constatent que les deux se parlent moins ou encore demander ce qu'il pense d'une situation amoureuse dans sa série télé préférée. «Tout ceci, qui peut sembler anodin, va tellement être porteur pour ouvrir la voie à avoir des discussions plus intimes», affirme la sexologue. 

Jeunes issus de la diversité sexuelle et de genre

Le rapport de Statistique Canada s'est aussi intéressé aux sources de renseignements sur la santé sexuelle chez les adolescents de la diversité sexuelle ou de genre, ce qui comprend les personnes transgenres, non-binaires ou ayant une attirance pour des personnes du même sexe. 

Par rapport aux jeunes cisgenres attirés uniquement par des personnes d’un genre différent, une proportion plus faible de jeunes de la diversité sexuelle ou de genre a indiqué avoir un adulte à qui parler pour obtenir des renseignements sur la santé sexuelle, 82 % contre 87 %. 

Mme Lemay est préoccupée par cette donnée. Ce qui en ressort, selon elle, est que ces jeunes préfèrent se tourner vers des sources qu’ils vont consulter de façon autonome et confidentielle tandis qu'une majorité des jeunes cisgenres hétérosexuels se tournent vers des ressources humaines. «C’est important cet aspect d’humanité, d’écoute, de bienveillance. De savoir que les jeunes issus des diversités sexuelles et de genre sentent peut-être qu’ils seront moins accueillis avec cette ouverture, je me dis qu’il y a encore du travail à faire», mentionne-t-elle. 

«Ce qu’on voit dans cette statistique, c’est qu’en matière d’éducation à la sexualité, il y a peut-être moins d’espace pour les jeunes issus des diversités sexuelles et de genre. C’est préoccupant et il faut penser à nos postures en éducation. Quel rôle peut-on jouer pour que tout le monde s'y sente le bienvenu?» 

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne