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CHU de Québec-Université Laval

L'utilité des analgésiques pour soulager les maux de dos semble incertaine

durée 12h00
3 avril 2023
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne

Même après des décennies de recherche, rien ne permet pour le moment de conclure à l'efficacité ou à l'innocuité des analgésiques dans le traitement des maux de dos aigus, prévient une nouvelle méta-analyse.

Certains de ces analgésiques pourraient même s'accompagner d'effets secondaires indésirables comme des nausées, des vomissements, des étourdissements et des maux de tête.

En attendant la publication d'essais cliniques de meilleure qualité comparant les analgésiques, écrivent les auteurs australiens de la nouvelle méta-analyse, «il est conseillé aux cliniciens et aux patients de faire preuve de prudence dans la prise en charge avec des analgésiques de la lombalgie aiguë non spécifique».

«Ça nous dit que les médicaments ne sont pas très efficaces, mais c'est aussi ce qu'on voit en clinique», a commenté la cheffe du service de douleur chronique du CHU de Québec-Université Laval, la docteure Anne-Marie Pinard.

«Les médicaments vont enlever en général entre 30 et 50 % de la douleur. Il n'y a pas de médicament qui va anéantir la douleur ou l'annuler complètement. Les médicaments ont une certaine efficacité, mais le reste doit être pris en charge par d'autres modalités.»

La méta-analyse a porté sur une centaine d'études réalisées entre 1964 et 2021. Ces études regroupaient quelque 15 000 patients à qui on avait prescrit des molécules aussi courantes que le paracétamol (Tylenol), l'ibuprofène (Advil) et la codéine pour leurs maux de dos durant moins de six semaines, mais aussi des médicaments obscurs qui ne sont parfois plus utilisés aujourd'hui.

En dépit des limites de la médication, a dit la docteure Pinard, on ne peut pas rester les bras croisés face à un patient souffrant. Il faut donc envisager des interventions complémentaires comme la réadaptation, la visualisation, la relaxation et la respiration qui ont chacune «une bonne efficacité».

Chaque patient pourra développer sa stratégie, mais il ne faut pas anticiper de résultats «spectaculaires» avec la médication, a-t-elle souligné.

«C'est la partie 'créativité' de la médecine, a expliqué la spécialiste. C'est la partie qui nous permet d'essayer d'adapter un traitement à la situation particulière d'un patient avec les connaissances scientifiques qu'on a. Mais aussi, l'interaction humaine va nous permettre de trouver une solution qui va être la plus adaptée à la situation particulière d'un patient.»

Les spécialistes du traitement de la douleur rencontrent fréquemment des patients qui recherchent une solution rapide, sans efforts, qui fera disparaître instantanément (ou presque) leur souffrance.

Il est donc plus facile de convaincre un patient de prendre deux comprimés le matin que de le convaincre de s'astreindre à un programme de physiothérapie de plusieurs semaines.

«C'est le quotidien de ma clinique, a ainsi indiqué la docteure Pinard. Mais je dis souvent à mes patients que ma clinique n'est pas comme un garage, vous ne pouvez pas nous apporter votre corps comme vous nous apporteriez votre voiture et on va vous appeler quand ça va être réglé. Ça prend une implication.»

D'autant plus, poursuit-elle, que les patients pourront être appelés à modifier des habitudes de vie «douteuses» qui pourront contribuer à leur douleur. Plusieurs problèmes de santé, dont la lombalgie, ne se produiraient pas (ou se produiraient moins souvent) si les gens étaient plus actifs ou s'alimentaient mieux, a-t-elle rappelé.

«Les gens sont habitués de chercher une solution qui est un peu extérieure, qui va venir régler le problème alors que des fois il y a une partie du problème qui vient de l'intérieur», a dit la docteure Pinard.

La lombalgie est un «super bon exemple», a-t-elle ajouté. Des patients qui ont mal au dos depuis plusieurs années pourront être soulagés par l'enseignement de nouvelles habitudes et par un programme d'exercices, seulement pour tout abandonner au bout de huit ou dix semaines quand ils commencent à se sentir mieux.

«Ils sont contents, mais on les revoit pour la même chose après deux ou trois ans parce qu'ils ont arrêté de faire leurs exercices parce que ça allait bien, a-t-elle déploré. Les gens reprennent leurs vieilles habitudes de vie, et ils nous reviennent un peu découragés.»

Une méta-analyse comme celle-ci ne changera pas la pratique des médecins qui se doivent de trouver une solution pour soulager la douleur de leurs patients, a-t-elle dit en conclusion. Elle pourrait toutefois venir alimenter une discussion entre le médecin et son patient sur les limites de la médication.

«Si ça peut nous aider à informer les gens que non, les pilules ne font pas nécessairement le travail que les gens voudraient qu'elles fassent et qu'il y a un travail à faire sur soi-même, je pense que c'est vraiment intéressant sur cet aspect-là», a dit la docteure Pinard.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le prestigieux journal médical The BMJ.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne

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