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Commission d'enquête Gallant

SAAQclic: des experts en gestion de projet critiquent l'ensemble de l'oeuvre

durée 09h00
23 octobre 2025
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Par La Presse Canadienne

La transformation numérique de la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ), qui a mené au déploiement catastrophique de la plateforme SAAQclic et à des dépassements de coûts vertigineux, a été mal préparée, mal gérée et déployée trop rapidement.

Un groupe de spécialistes en gestion de projet de l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’UQAM a poliment dépecé devant le commissaire Denis Gallant, mercredi, l’ensemble du processus de transformation numérique de la SAAQ.

Le titulaire de la Chaire de gestion de projet de l’ESG, Alejandro Romero-Torres, accompagné de deux collègues, Sanaa El Boukri et Monique Aubry, ont présenté une série de constats et de recommandations dans lesquels les questions de manque de compétence, de projet mal défini et d’empressement, entre autres, ont dominé l’analyse.

Chaos

Le lancement de la plateforme SAAQclic a «généré du chaos» parce que «la définition du projet était incomplète», a expliqué M. Romero-Torres. «On a essayé de gagner du temps en allant vite», a-t-il tranché. La définition d’un projet de cette envergure aurait dû être mieux élaborée, selon lui.

Pour ce groupe d’experts, il sera nécessaire à l’avenir d’exiger des dossiers d’affaires complets et détaillés, de préparer systématiquement des scénarios «gradués et modulaires» et de soumettre les hypothèses de coûts, délais et risques à une validation indépendante.

La volonté d’utiliser une «méthode agile», une approche probablement trop rigide pour ce genre de projet – surtout dans le secteur public – devra être encadrée par des lignes directrices précises, selon eux. Il sera nécessaire à l’avenir d’inclure les analyses de risque dans les tableaux de bord remis aux instances de gouvernance et assurer un suivi rigoureux de la gestion financière des projets en distinguant clairement les différents postes de dépenses.

En matière de relations avec les fournisseurs, ils estiment impératif de renforcer la capacité interne de maîtrise d’œuvre et de séparer clairement les responsabilités contractuelles dès la conception et l’évaluation des contrats et d’encadrer les coûts des fournisseurs.

Problèmes de compétence

Le professeur Romero-Torres a par ailleurs soulevé de nombreuses questions liées à la compétence des parties prenantes au sein de la société d’État. «On peut se poser la question: est-ce qu’ils n'avaient pas les connaissances au niveau technologique, les connaissances au niveau de transformation organisationnelle, les connaissances par rapport à la gouvernance du projet ou même les connaissances par rapport aux rôles qu'ils devaient jouer?»

«Je suis sûr que toutes les personnes qui étaient autour du projet voulaient bien jouer leur rôle, mais est-ce que leur rôle était clair? Est-ce qu'ils avaient les compétences et les capacités pour pouvoir les jouer?» On ne se surprendra pas de l’entendre recommander une formation continue tant au niveau décisionnel qu’opérationnel et le développement d’une expertise interne.

Au-delà de la SAAQ, le mémoire des spécialistes propose d’instaurer «un cadre de gouvernance propre aux projets de ressources informationnelles au Québec» qui s’appliquerait donc aux futurs projets de transformation numérique dans le secteur public. Ils recommandent de plus d’«encourager une culture qui favorise la transparence et la confiance et d’assurer une reddition de comptes périodique, systématique et publique», ce qui n’a jamais été le cas dans le dossier de la SAAQ.

Apprendre du passé

Alejandro Romero-Torres va plus loin en proposant d’instaurer des comités indépendants de surveillance des projets majeurs pour «permettre de réaligner des pratiques de certains types de projets où on trouve qu'ils commencent à avoir une faible performance, avoir aussi le conseil stratégique, mais surtout apprendre. C'est un grand enjeu qu'on observe dans beaucoup de projets, c'est qu'on ne veut pas apprendre de ce qu'on a fait dans le passé.»

Plus tôt, Mélanie Roussy, professeure à l’École de comptabilité de l’Université Laval, s’était longuement attardée sur le rôle de l’audit interne, dont la mission devrait normalement être de «fournir de l’assurance à la gouvernance et contribuer à l’optimisation de la performance organisationnelle en matière de gestion des risques».

Cette division de l’audit, a-t-elle noté, relève à la fois du comité d’audit du conseil d'administration et de la direction générale, ce qui peut représenter une source de tension. Surtout, a-t-elle précisé, il ne faut pas laisser les employés de la division de l’audit interne «glisser sous une vice-présidence», ce qui risque de leur faire perdre une part de leur légitimité.

«Une confiance sceptique»

Elle aussi a plaidé pour une formation plus serrée et spécialisée des membres du conseil d’administration qui siègent sur le comité d’audit et suggère l’émission de mandats d’audit en continu visant les principaux risques d’une organisation.

Interrogée sur le fait que plusieurs témoins avaient tenté de se dédouaner en disant «avoir fait confiance» à l’un et l’autre, elle a répliqué que toutes les personnes impliquées dans ce genre de projet devraient avoir «une confiance sceptique. Il faut arrêter de voir ça comme quelque chose de négatif quand on travaille en gouvernance, en gestion des risques et en contrôle et qu'on a un devoir fiduciaire de saine gestion des fonds publics. Le scepticisme dans la confiance est sain. (…) Pour moi, c'est à l'opposé complètement d'une confiance aveugle, d'un aveuglement volontaire, d'opacité volontaire

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne

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