Qu’arrivera-t-il du barrage Fryer ?

Par Claudy Laplante-St-Jean
Construit en 1938 pour régulariser le cours d’eau de la rivière Richelieu et jamais mis en activité par la suite, le barrage Fryer a fait couler beaucoup d’encre depuis les 70 dernières années. Certains citoyens réclament toujours qu’il soit restauré pour en faire un passage piétonnier et cyclable tandis que Parcs Canada, de son côté n’a pas prévu de financement pour le barrage cette année.
« Parcs Canada a fait face à de nombreuses priorités au cours de l’année et n’a pas identifié de financement pour le barrage de l’île Fryer dans le présent exercice budgétaire, sauf pour des interventions ponctuelles de sécurisation », a expliqué Isabelle Savoie, des communications et relations publiques chez Parcs Canada.
Celle-ci a ajouté que l’agence consacre ses ressources actuelles à procurer aux utilisateurs du Canal-de-Chambly une expérience de qualité et sécuritaire et que Parcs Canada a pour mission de protéger les structures et la vocation des éléments qui font du lieu historique du canal un lieu unique de notre patrimoine.
Selon Mme Savoie, les personnes intéressées pourront présenter leur projet sur la réfection et le réaménagement du barrage de l’île Fryer dans le cadre de consultations publiques lors de la révision du plan directeur du lieu historique national du Canal-de-Chambly. Toutefois, le processus de mise à jour des plans directeurs a été suspendu le temps que Parcs Canada procède à l’évaluation à l’échelle nationale du programme des canaux historiques canadiens (exercice qui a pour objectif d’améliorer l’efficacité des opérations des canaux historiques tout en favorisant l’implication du public). Donc, la prochaine date de consultation publique n’est toujours pas connue.
Les Villes ouvertes à l’idée
Richelieu avait voté en 2005 une résolution indiquant qu’advenant l’ouverture du barrage, la municipalité serait prête à développer un stationnement incitatif pour les gens qui désirent le traverser en vélo ou à pied. « On avait reçu un accusé de réception, mais on c’était fait dire que cela coûterait plus cher le rénover que le défaire. Le dossier a reculé au lieu d’avancer, depuis », a indiqué le maire de Richelieu, Jacques Ladouceur.
De son côté, la Ville de Carignan serait ouverte à la réalisation projet d’aménagement sur le barrage, tout dépendamment des coûts engendrés et de l’implication de Parcs Canada et de la Ville de Richelieu.
Un dossier sur la glace depuis plus de 70 ans
« Depuis 70 ans, il n’y a eu aucun entretien, c’est une honte ! Il faut qu’il ait une utilité, c’est patrimonial ! », a lancé Pauline Drouin, ancienne conseillère municipale à Richelieu qui avait fait du dossier son principal cheval de bataille lors de son mandat.
Celle-ci a d’ailleurs gardé précieusement tous les articles concernant le sujet, certains datant même du début de la saga. « Le projet comprend le creusage et l’élargissement du chenal de la rivière Richelieu, dans les environs de Saint-Jean, la construction d’une digue de contrôle à l’île Fryer, un chenal de pas moins de 100 pieds de largeur sur une distance de 12,600 pieds et la construction d’une digue de contrôle à environ cinq milles et demi en bas du courant », pouvait-on lire dans un article datant du mois d’août 1937 du Canada Français à propos de la régularisation du niveau du Richelieu. À l’époque, la rivière avait été désignée comme voie maritime reliant les États-Unis et le Canada, d’où la nécessité de l’aménager correctement.
Avec la guerre froide des années 1950, le président des États-Unis, Harry Truman, décide que ce sera plutôt la voie maritime du fleuve Saint-Laurent qui sera le lien entre Montréal et les Grands Lacs. « Dans la période de crise actuelle, a déclaré le président Truman, il importe que soit réalisé le plus rapidement possible le projet de creusement du St-Laurent », relatait un article de 1951 du Canada Français.
Même si l’érection du barrage est complétée, son fonctionnement est alors mis en veilleuse.
De retour dans l’actualité
Le dossier du barrage Fryer refait surface en 1990 selon Mme Drouin alors que dans le plan directeur d’aménagement du canal de Chambly, Parcs Canada propose une solution. « Éventuellement à plus long terme, dans la mesure où les intervenants du milieu en assumeront la responsabilité, l’établissement d’un lien cyclable et piéton avec la rive est de la rivière », indiquait un article du Canada Français à propos dudit rapport.
De leurs côtés, les députés de l’époque sont favorables au projet et une pétition de 632 noms vient aussi l’appuyer.
En 1992, Parcs Canada offre de vendre pour la somme symbolique de 1 $ le barrage à la municipalité de Notre-Dame-de-Bon-Secours (municipalité maintenant affiliée à Richelieu) après avoir fait des travaux sur celui-ci pour le rendre accessible aux vélos. Celle-ci avait décliné l’offre en précisant que les frais d’entretien risquaient de représenter des sommes énormes pour la municipalité.
Quelques mois plus tard, Parcs Canada doit construire un muret de ciment de chaque côté du barrage pour empêcher son accès parce qu’il est établi qu’il n’est pas assez sécuritaire.
Le barrage Fryer est de retour dans l’actualité en 2002 alors que le président du Comité de concertation et de valorisation du bassin versant de la rivière Richelieu (COVABAR), Hubert Chamberland, avait soutenu « qu’on voit mal comment une telle infrastructure ne soit pas moins utilisée, c’est d’un ridicule consommé » en ajoutant que l’organisme était intéressé à revitaliser le barrage. La Société d’histoire de la seigneurie de Chambly appuie aussi la réhabilitation du barrage.
En 2005, une section de 20 pieds sur cinq pieds du barrage s’est écroulée dans la rivière. En réaction, des instances politiques et historiques se réunissent pour discuter du problème. De leur côté, les Amis du Fort Sainte-Thérèse demandent à Parcs Canada d’effectuer des fouilles sur le site de l’ancien fort de bois retracé sur l’île Fryer pour ensuite le reconstruire et en faire un lieu historique, dont ferait partie le barrage. La Ville de Richelieu s’engage aussi à aménager un stationnement à l’entrée du barrage dans le cas d’une décision de Parcs Canada de procéder à sa réfection.
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