Marilyne Dionne l'emporte contre la Commission scolaire des Patriotes

Par Myriam Tougas-Dumesnil
JUSTICE - Dans un jugement rendu jeudi, la Cour suprême du Canada reconnaît le droit aux enseignantes suppléantes enceintes de se prévaloir du retrait préventif, au même titre que les autres travailleuses.
Après un combat judiciaire qui aura duré huit ans, Marilyne Dionne a vu le plus haut tribunal du pays lui donner raison. Dans une décision unanime, les juges de la Cour suprême ont indiqué que la femme avait droit au retrait préventif durant sa grossesse, même si elle était, en tant qu'enseignante suppléante pour la Commission scolaire des Patriotes, une travailleuse occasionnelle.
Les juges considèrent que les enseignants suppléants sont des travailleurs au sens de la Loi sur la santé et la sécurité du travail dès qu'ils acceptent une offre de travail. Ils ont alors droit aux mêmes protections que les autres travailleurs.
Rappel des faits
Le 24 septembre 2006, alors qu'elle est inscrite sur la liste des enseignants suppléants de la Commission scolaire des Patriotes, Marilyne Dionne apprend qu'elle est enceinte. Quelques jours plus tard, son médecin l'informe qu'elle est vulnérable au Parvovirus, un virus contagieux qui peut se propager par des groupes d'enfants et qui peut être dangereux pour le fœtus. Il remplit donc un certificat visant son retrait préventif, indiquant que son lieu de travail présente un risque pour la santé du fœtus.
Le 13 novembre, le centre d'appel de la Commission scolaire des Patriotes (CSP) lui présente une offre de suppléance pour la journée. Elle accepte.
Deux semaines plus tard, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) informe Mme Dionne que, parce qu'elle a conclu un contrat avec la CSP le 13 novembre, elle est en droit de toucher une indemnité de revenu pendant sa grossesse.
Procédures
Les procédures judiciaires se sont ensuite enclenchées quand la Commission scolaire des Patriotes a demandé une révision de la décision rendue par la CSST et obtenu gain de cause devant la Commission des lésions professionnelles. Selon la CSP, Marilyne Dionne était dans l'incapacité d'effectuer la tâche d'enseignante suppléante parce qu'elle ne pouvait entrer dans l'école. Elle argue donc qu'aucun contrait de travail n'avait été formé et que Mme Dionne n'était pas une travailleuse au sens de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.
Les juges de la Cour supérieure et de la Cour d'appel du Québec ont par la suite confirmé cette décision de la Commission des lésions professionnelles. Le jugement rendu par la Cour suprême du Canada vient renverser les décisions prises par les tribunaux inférieurs.
«Au cours de l'année scolaire 2005-2006, l'enseignante a fait 88 jours de suppléance sur 200 jours d'école, travaillant presque à temps plein en 2006», peut-on lire dans le jugement de la Cour suprême.
Législation et rémunération
La Loi sur la santé et la sécurité du travail permet aux femmes enceintes de refuser d'effectuer des tâches dans des conditions qui mettraient en danger leur santé ou leur sécurité ou celles de leur enfant à naître. La loi prévoit également qu'elles peuvent être affectées à d'autres tâches pour éviter ces risques.
Toutefois, si la réaffectation est impossible, elles ont droit à un retrait préventif au cours duquel elles cessent de travailler et reçoivent des indemnités de remplacement du revenu.
Une travailleuse en retrait préventif a droit à sa pleine rémunération pendant les cinq premiers jours ouvrables de cessation de travail. Elle reçoit par la suite 90% de son salaire net pour les jours où elle aurait normalement travaillé, n'eût été le risque pour la santé ou la sécurité. Ces prestations sont calculées en fonction du revenu gagné par la travailleuse pendant l'année précédant la grossesse.
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